Pour 100 euros par personne et au terme de 3 heures et demie de vol, nous rallions Marrakech au départ de Charleroi. De là, une voiture nous conduit pour 60 euros à Essaouira, située sur la côte atlantique à quelque 190 kilomètres de l’aéroport, un trajet que nous parcourons en 2 heures et demie. Notre hôtel, le riad Casa Lila, l’ancienne demeure d’un riche marchand, compte 8 chambres. Chacune d’elle est dédiée à une couleur, et toutes sont joliment décorées. Celle que nous avons réservée, la Vert anis, nous revient à 75 euros la nuit et se trouve au rez-de-chaussée, ce qui nous permet de profiter directement du patio aménagé en salon.
La ville d’Essaouira comprend une jolie médina cernée de remparts et dans laquelle la circulation automobile est interdite. Il s’en dégage une atmosphère paisible, malgré l’activité constante qui y règne. Il est très agréable de flâner dans le lacis de ruelles, tantôt pleines d’échoppes variées, tantôt réservées aux habitations, dominées par le blanc des murs et le « bleu de Mogador » des boiseries.
Une des portes de la médina donne directement sur le port de chalutiers, des bateaux de bois à la quille peinte dans le bleu de la ville. Des gargotes équipées d’un gril à charbon cuisinent directement les poissons du jour, que l’on choisit à sa guise avant de les déguster sur place, accompagnés d’une petite salade, pour un montant tout à fait modique.
Dans la sqala du port, il est possible de grimper au sommet du bastion, d’où l’on jouit d’une jolie vue sur le port, la ville en contre-bas et les fortes vagues de l’Atlantique, au son des cris des goélands.
Au cœur de la médina, le souk Jdid abrite un joli petit marché aux poissons tout carrelé, où de nombreux vendeurs haranguent le passant pour lui vendre sardines, rougets, rascasses, bonites, oursins, congres, sars et autres araignées de mer. Nous achetons différents poissons, puis les faisons cuire dans un des petits restos jouxtant le marché et fort prisés par la population locale. Notre addition s’élève à une petite dizaine d’euros pour deux.
À une trentaine de kilomètres d’Essaouira se tient tous les dimanches le grand marché de Had-Drâa, exclusivement fréquenté par des hommes. On y vend absolument de tout : des épices, fruits et légumes aux outils, portes, tissus etc. Il y a également une section animaux, allant des poulets aux dromadaires en passant par les vaches et les ânes. Les âmes sensibles s’abstiendront d’assister à l’agonie des poulets qu’on égorge et qu’on laisse se vider de leur sang la tête en bas dans des cônes en métal, les pattes s’agitant désespérément dans le vide. Elles détourneront également leur regard des têtes de vache suspendues à des crochets. Plus réjouissant, on y trouve également toute une rangée de coiffeurs et barbiers qui prennent leurs clients en main sous des tentes de toile écrue. On peut également y acheter de la viande et la faire préparer dans des cafés berbères, où l’on déguste sa commande assis à même le sol. Une visite très intéressante et haute en couleur.
À environ 25 kilomètres d’Essaouira se trouve le Val d’Argan, un vignoble d’une cinquantaine d’hectares créé en 1994 par un vigneron français, entièrement dédié aux cépages du Rhône. La visite est très intéressante et le site particulièrement pittoresque avec ses vignobles plantés d’oliviers. Pour ceux qui ne se remettraient pas de la dégustation, de jolies chambres d’hôtes sont aménagées sur le domaine.
Sur le plan gastronomique, la ville d’Essaouira recèle un petit joyau : L’Heure Bleue, le restaurant de l’hôtel éponyme, qui fut la demeure d’un caïd au 19ème siècle. L’endroit a conservé tout son faste et son charme d’origine, avec un superbe patio arboré et illuminé le soir. Mais, plus important, la table du chef Ahmed Handour y est exceptionnelle. Sa cuisine allie saveurs traditionnelles authentiques et créativité, avec une qualité irréprochable et des prix somme toute très accessibles, avec des plats tournant autour des 20-25 euros. Nous dégustons également d’excellents vins du Maroc, et notamment ceux du Val d’Argan dont nous parlions plus haut.
La plage s’étend de part et d’autre de la ville. En direction d’Agadir, une plage de sable bordée d’une promenade permet de se dégourdir les jambes sur plusieurs kilomètres. C’est là que se trouvent les hôtels modernes et établissements dédiés au surf. De l’autre côté, en partant vers Casablanca, la plage se fait sauvage, ponctuée de rochers qui attirent les pêcheurs. En surplomb, on y trouve aussi, côte à côte, un cimetière chrétien et un cimetière juif, qui illustrent le lieu de convergence aux multiples traditions que fut Essaouira.
À Essaouira, impossible d’échapper à l’huile d’argan et ses produits dérivés, cosmétiques et alimentaires. Dans la ville, les boutiques foisonnent. L’extraction de l’huile étant une opération strictement manuelle, on peut voir de nombreuses femmes actionner un petit moulin de pierre devant le pas de leur échoppe. L’autre produit artisanal de la région est la marqueterie en loupe de thuya, comment en témoignent les nombreux ateliers installés dans la ville.
En conclusion, ces quelques jours printaniers au cœur de l’hiver belge ont été une véritable bulle de bien-être dans un endroit aussi paisible que charmant. L’atmosphère maritime ajoute encore à l’attrait des lieux et on profite en toute quiétude des atouts naturels, historiques et culturels de la ville. Bref, on est loin de l’ambiance factice de Marrakech, et les rapports humains sont eux aussi beaucoup plus authentiques. Faut-il aller à Essaouira ? Cette escapade bienfaisante plaira certainement à plus d’un !
Catherine et Daniel