21 octobre 2025 2 21 /10 /octobre /2025 14:15
Voyage en Chine - 6 : Baishuitai, Shangri-La

Jeudi 31 juillet

En guise de petit déjeuner, le propriétaire de notre maison d'hôtes nous concocte une épaisse crêpe mille trous plus que nourrissante. Il est un peu plus de huit heures du matin lorsque nous remontons en voiture, en direction des terrasses de Baishuitai. Nous arrivons à destination vers 10 heures, et entamons d'emblée notre promenade parmi cet ensemble unique de terrasses calcaires formées par le dépôt de carbonate de calcium au fil des siècles, et considéré comme le berceau de la culture Dongba du peuple Naxi. Les sources qui s’écoulent sur ces gradins naturels ont créé des bassins aux contours doux, où l’eau prend des reflets bleu-vert selon la lumière et la pureté du calcaire.

Terrasses calcaires de Baishuitai

Terrasses calcaires de Baishuitai

Nous reprenons la voiture, et poursuivons notre route jusqu'au monastère de Ringha, l’un des plus importants sanctuaires tibétains du Yunnan. Également appelé temple des cinq bouddhas de la sagesse, ce sanctuaire de taille modeste conserve néanmoins le charme des monastères traditionnels, avec ses façades colorées, ses prières peintes et son atmosphère recueillie. Lieu de pèlerinage plus que de visite touristique, il est le symbole d'une foi simple et authentique, comme en témoignent les bouquets de branchages généreusement chargés de drapeaux de prières tibétains érigés sur le site.

Monastère de Ringha

Monastère de Ringha

Une vingtaine de kilomètres nous séparent de Shangri-La, notre destination finale du jour. Il s'agit en réalité de la ville de Zhongdian, rebaptisée Shangri-La en 2001, en raison de ses étonnantes similitudes avec le site utopique que décrit James Hilton dans son roman Horizon Perdu. Notre chauffeur se gare dans un parking souterrain jouxtant le centre-ville interdit aux voitures. Une navette électrique nous dépose à la porte de notre hôtel, l’Arro Khampa Shangri-La. Ce boutique-hôtel raffiné est décoré dans le style tibétain traditionnel avec un grand souci du détail. Bois sculpté, tapis colorés, lanternes et meubles artisanaux créent une atmosphère chaleureuse et élégante.

Reconstruite après l’incendie de 2014, la ville de Shangri-La mêle maisons tibétaines traditionnelles en bois sculpté et ruelles pavées bordées de boutiques et de restaurants. Malgré l’omniprésence commerciale, nous retrouvons cette atmosphère particulière des villes et villages des plateaux tibétains, telle que nous l'avons connue au Népal et au Ladakh.

Shangri-La

Shangri-La

Tandis que nous nous promenons au fil des rues, la pluie se met à tomber, de plus en plus abondante jusqu'à devenir torrentielle. Nous nous abritons tant bien que mal sous le toit en auvent d'une boutique, mais la pluie persiste sans faire mine de faiblir et nous bravons ce déluge pour regagner notre hôtel, trempés des pieds à la tête. Une fois séchés et changés, nous nous installons au bar de l'hôtel et commandons un flight de dégustation proposant cinq vins différents du même domaine local, The Red Punch Cellars. Les cuvées C’est chouette (en français sur l'étiquette) sont convaincantes, précises et soignées, et nous les savourons tranquillement, confortablement installés dans le moelleux sofa du bar, tandis qu'à l'extérieur la pluie cesse enfin de tomber. Nous ressortons en quête d'un restaurant pour notre repas du soir, et optons pour un hotpot tibétain accompagné d'une galette d'orge, la spécialité de la région. Le hotpot à base de viande de yak cuisant dans un bouillon épicé où nagent quelques petits légumes verts n'est certes pas mauvais, mais nous déçoit comparé à la somptueuse et généreuse fondue dont nous nous étions régalés jadis au Summer Harvest de Leh.

Hotpot

Hotpot

Sur le chemin du retour vers l'hôtel, nous faisons halte dans une boutique de spiritueux et, après dégustation, achetons pour moins de 20 euros une bouteille de Wu Chen, un excellent whisky à base de maïs et de malt produit à Yantai.

Vendredi 1er août

Nous prenons notre petit déjeuner à notre hôtel, retrouvons notre chauffeur/guide et entamons notre journée par la visite du plus grand monastère tibétain du Yunnan, le Ganden Songzanlin, situé à une petite poignée de kilomètres de Shangri-La. Surnommé le ‘petit Potala’, ce monastère a été fondé au 17e siècle sous l’impulsion de Lobsang Gyatso, le 5ᵉ dalaï-lama. Détruit lors de la révolution culturelle, il fut reconstruit dans les années 1980-90. Ce superbe ensemble architectural domine la plaine de Shangri-La du haut de ses toits dorés, abrite plus de 600 moines et comprend de vastes salles de prière décorées de fresques colorées, d'imposantes statues et de rangées de moulins à prières. Nous nous imprégnons de l'atmosphère spirituelle des lieux, intensément perceptible malgré la foule des nombreux touristes chinois, et enchaînons par une promenade autour du paisible lac qui jouxte le Ganden Songzanlin et d'où l'on jouit d'une belle vue sur le monastère proprement dit et la nature environnante.

Ganden Songzanlin

Ganden Songzanlin

Nous repartons ensuite en direction du lac Napahai. Situé à une petite dizaine de kilomètres de Shangri-La, le lac Napahai est une vaste zone humide nichée à plus de 3200 mètres d’altitude. Sa superficie varie selon les saisons : il s’étend largement durant la mousson et se rétracte en hiver, laissant place à de grandes prairies. Refuge de nombreuses espèces migratrices, il est notamment connu pour accueillir les grues à col noir et les vautours de l'Himalaya. Autour du lac, les pâturages sont occupés par les troupeaux de yaks et de chevaux, offrant un paysage typique du plateau tibétain. Nous suivons la route qui longe le lac avant de faire une halte pour nous rapprocher à pied d'un troupeau de yaks noirs et blancs, accompagnés de quelques petits âgés d'environ deux mois.

Yaks au lac Napahai

Yaks au lac Napahai

De retour en ville, nous nous rendons au marché local et y achetons un gyakok, le traditionnel récipient en cuivre des fondues tibétaines, original par sa forme. Une cheminée de métal s’élève en son centre, emplie des braises qui maintiennent le bouillon frémissant contenu dans la gouttière circulaire qui l'entoure. Les convives cuisent directement dans le bouillon parfumé des émincés de viande (généralement du yak), des légumes, des nouilles et des champignons.

Dominant la vieille ville de Shangri-La, la colline en forme de tortue de Guishan Park est surmontée d'un temple bouddhiste offrant une vue panoramique sur les toits traditionnels environnants. Lieu de pèlerinage et de recueillement, le site est célèbre pour abriter un des plus grands moulins à prière du monde : un cylindre doré de 60 tonnes et de plus de 20 mètres de haut, que les fidèles et les visiteurs font tourner en groupe.

Au hasard de notre promenade dans les ruelles de la vieille ville, nous poussons la porte d'un des nombreux salons de massage. Nous commandons d'abord chacun un massage des pieds, mais les soins prodigués sont si agréables que nous finissons par demander d'étendre la séance au reste du corps : tête, bras et jambes, épaules et dos. Nous profitons béatement de ce délicieux moment de détente pour lequel nous payons chacun 136 yuan, soit environ 16 euros, une somme dérisoire pour plus d'une heure de prestation.

Pour notre repas du soir, nous nous installons au Three Brothers, un établissement situé au cœur de la vieille ville et, selon notre guide, l'un des rares à proposer une authentique cuisine tibétaine. De fait, nous nous régalons des nombreuses et généreuses préparations à base de viande et de fromage de yak que nous y recevons, et que nous accompagnons de Fat Dolma, une bière locale fraîche et désaltérante à souhait. La très modeste addition s'élève à 300 yuan, soit 36 euros.

Nous gagnons la place publique proche et assistons à la danse Guozhuang qui, comme chaque soir, rassemble par dizaines les habitants de la ville. Les danseurs forment des cercles concentriques qui tournent dans le sens des aiguilles d'une montre. Au centre, deux ou trois personnes indiquent la chorégraphie des bras, tour à tour levés, secoués et balancés. Il se dégage de cet étonnant spectacle collectif de rue une harmonie de gestes à la fois festive et rituélique. Nous passons un long moment à contempler ce saisissant ballet folklorique avant de regagner notre hôtel.

Danse Guozhuang

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